RIP. Stan Lee, le créateur de superhéros des Comics Marvel, est mort à 95 ans
Il n’est pas peu dire que Stan Lee a révolutionné la bande dessinée américaine dans les années 60, lui qui a créé Spider-Man, Iron Man, Black Panther, Hulk, les X-Men, Thor… L’écrivain vient de mourir à Los Angeles hier, lundi 12 novembre, à l’âge de 95 ans.
Stan Lee – de son vrai nom Stanley Martin Lieber – est né le 28 décembre 1922 à Manhattan, aîné de deux garçons, fils de Jack Lieber et de Celia (Solomon) Lieber, tous deux immigrants venus de Roumanie. Alors que le jeune Stanley est encore tout jeune, la famille déménage dans le Bronx.
De Shakespeare aux Quatre Fantastiques
Stanley commence à lire William Shakespeare alors qu’il n’a que dix ans, en même temps qu’il dévore les “pulp magazines”, ainsi que les romans d’Arthur Conan Doyle, d’Edgar Rice Burroughs et de Mark Twain. Il est captivé par les films de cape et d’épée avec Errol Flynn.
À dix-sept ans, bachelier de l’école DeWitt Clinton dans le Bronx, il souhaite s’adonner à la vraie littérature. Mais de petits boulots en petits boulots, il est embauché à Timely Publications, une compagnie possédée par Martin Goodman, un parent qui s’est fait un nom dans les fameux “pulp magazines” et qui souhaite entrer dans le marché de la bande dessinée.
Au Timely, il travaille tout d’abord avec Jack Kirby, artiste célèbre pour avoir créé, avec l’écrivain Joe Simon, Captain America. Jack Kirby joue un rôle décisif dans le parcours de Stan Lee. C’est ainsi que tout a vraiment commencé dans un tout petit bureau, très encombré, de Madison Avenue à Manhattan, dans les années 60. En 1961, Stan Lee et Jack Kirby créent, pour ce qui allait devenir bientôt Marvel, les Quatre Fantastiques, une équipe de héros surpuissants aux dimensions humaines : identités non secrètes, querelles internes et tourments intérieurs (notamment la Chose)… C’est un succès immédiat. Les deux hommes enchaînent avec l’incroyable Hulk, sorte de docteur Jekyll et de M. Hyde moderne qui raconte l’histoire d’un honnête homme transformé en monstre par des radiations.
En 1947, Stan Lee épouse Joan Boocock, un ancien mannequin britannique venu faire carrière aux États-Unis. Ils ont deux filles : Joan Celia Lee, plus connue sous le nom de J. C., est née en 1950 ; la seconde, Jan, est morte trois jours après sa naissance en 1953. Joan Boocock-Lee meurt quant à elle en 2017.
Créatif prolifique
Après le départ de Jack Kirby, séduit par une compagnie concurrente, Stan Lee devient alors rédacteur en chef. Il utilise plusieurs pseudonymes pour donner l’impression que Marvel a un large panel d’écrivains dans ses rangs ; le nom qui lui reste collé à la peau est celui de Stan Lee, qui n’est que son prénom coupé en deux parties. En 1970, ce pseudonyme devient son nom légal : Stanley Martin Lieber porte désormais officiellement le nom de Lee.
Stan Lee devient ainsi progressivement le principal créateur de superhéros. Écrivain, rédacteur en chef, éditeur, promoteur exécutif et infatigable de Marvel et de lui-même, il joue un rôle décisif dans ce que les fans ont appelé depuis l’âge d’or du « comic » et de Marvel. Son personnage le plus emblématique, qui le fait accéder à la notoriété mondiale, est créée avec l’artiste Steve Ditko, mort également cette année, en 1962 : Spider-Man.
Si certains superhéros tels que Flash furent créés dès la deuxième partie des années 50, Stan Lee fut le premier à imprégner ses héros de doutes, de névroses, d’insécurités, de souffrances propres au commun des mortels, de combats liés à l’actualité politique et sociale… Cette humanisation des superhéros est doublée d’un profond sens de l’humour, qui a conquis des millions de lecteurs.
« J’ai essayé de faire d’eux des personnages de chair et de sang, avec une personnalité, confie-t-il au Washington Post en 1992. C’est ce que toute histoire devrait avoir, mais les comics n’en avaient alors pas, à cette époque. Les superhéros n’étaient que de simples figurines en carton. »
Stan Lee travaille vite, très vite, ainsi qu’il le reconnaît lui-même : « Presque tout ce que j’ai écrit, je pouvais le terminer en une seule séance. J’étais un écrivain rapide. Peut-être pas le meilleur, mais le plus rapide. » Au risque de blesser les illustrateurs qu’il embauche et qui finissent souvent, faute d’être reconnus, par quitter le navire Marvel non sans amertume. Ce fut notamment le cas de Jack Kirby (avec qui Marvel fut très longtemps, jusqu’en 2014, en procès) et – surtout – de Steve Ditko, co-créateur de Spider-Man.
Hollywood
Stan Lee déménage à Los Angeles dans les années 80, pour développer les activités de Marvel dans les studios d’Hollywood. À l’exception de la série L’Incroyable Hulk, diffusée sur CBS entre 1978 et 1982, ses tentatives se soldent essentiellement par des échecs. Il faut attendre les années 2000, et notamment le succès planétaire du premier Spider-Man en 2002, pour voir les superhéros envahir les écrans, au grand plaisir de nombreux, toujours plus nombreux spectateurs. En témoigne le récent succès de Black Panther, qui a atteint des records inégalés d’audience.
En 2001, Stan Lee crée POW! Entertainment, qui ne reçoit aucun revenu des films et séries Marvel, jusqu’à ce qu’il remporte un court procès avec son précédent employeur en 2005, qui lui permet de de recevoir dix millions de dollars. En 2009, Walt Disney Company, qui a accepté de payer quatre millions pour acquérir Marvel, annonce qu’elle accroît sa mise de 2,5 millions pour POW!
Des procès ont entachés la fin de vie de Stan Lee, notamment avec sa fille. Ces dernières années, il a publié deux ouvrages racontant sa vie, lui qui était obsédé par la mort. Ainsi confie-t-il dans le documentaire télévisé paru en 2010 et intitulé With Great Power… : The Stan Lee Story : « Je veux faire plus de films, je veux faire plus de télévision, plus de DVD, je veux faire plus de conférences, je veux faire plus de tout ce que je fais. Le seul problème est le temps. J’aurais simplement souhaité avoir plus de temps. »
Correspondant Amérique du Nord
Photographie de Une – Stan Lee au San Diego Comic Con à San Diego, Californie en 2010
(crédits : Gage Skidmore)