Recyclage : le mobilier design d’Emmaüs créé à partir de décors du TNP
Dans le cadre d’un partenariat avec l’Atelier Emmaüs de Villeurbanne, le Théâtre national populaire (TNP) de Villeurbanne prend part à la transition écologique très concrètement, en donnant une seconde vie à ses décors. C’est le projet « Morceaux choisis ». Que deviennent-ils ? Quels sont les différents enjeux liés à cette action ?
Rencontre avec Stéphanie Laude, chargée de missions et du développement durable au sein du TNP, pour connaître les défis que représentent l’éco-conception des œuvres et le réemploi des matériaux scéniques dans le spectacle vivant.
Entre éco-conception et recyclage
La volonté de s’engager pour la question environnementale est de plus en plus partagée au sein des structures de création et de diffusion du spectacle vivant. « S’il y a un vrai souci de la construction des décors, on n’en est pas encore au stade où l’on réfléchit à un décor en y intégrant des critères d’écologie, explique Stéphanie Laude. Sur ce plan, l’Opéra de Lyon est exemplaire, ils ont un bureau d’étude dédié et ont conçu un outil mais ne savent pas encore comment ils vont le diffuser, gratuitement ou pas. » Là où le TNP est très actif en revanche, c’est sur les procédures de réemploi des décors, à la suite des phases de création et de diffusion des spectacles.
Ainsi que le constate Kakie Roubaud dans un article publié par Profession Spectacle, l’initiative vient souvent des metteurs en scène. Cela se vérifie au sein du TNP. « C’est du bon sens mais aussi une préoccupation du directeur Jean Bellorini, qui est très sensible à cette question, relève Stéphanie Laude. En 2020, lors du changement de direction, il fallait vider notre lieu de stockage pour faire de la place. Christian Schiaretti a récupéré ce qu’il souhaitait ; restait tout ce qu’il n’a pas repris. On a contacté les compagnies locales, la Friche Lamartine ou encore le CCO La Rayonne. Des choses sont parties à la benne, mais bien moins que si l’on n’avait pas mené l’opération ! »
Un partenariat mené avec l’Atelier Emmaüs
Depuis cet appel lancé aux différentes structures locales, un partenariat est né avec l’Atelier Emmaüs de Villeurbanne, permettant de donner une seconde vie aux objets stockés et inutilisés. Les enjeux liés à ce projet baptisé « Morceaux choisis » sont donc écologiques et socio-économiques, car les artisans-apprenants de l’atelier ont créé la série de meubles Henri. Modernes et design, ils sont un assemblage de panneaux de bois aggloméré, déclassés par l’industrie, et de décors de théâtre. Leur nom est emprunté à Henri Grouès, plus connu sous son nom de résistant l’abbé Pierre – prêtre catholique, fondateur de la célèbre association Emmaüs.
« Christian Schiaretti faisait construire des décors monumentaux, très spécifiques et peu réutilisables, poursuit la responsable du développement durable au TNP. Par exemple, en 2011, il a monté Ruy Blas et le décor était entièrement fait d’azuléjos qu’ils ont récupéré, de même que les chutes de piano accumulées par Jean Bellorini pour son spectacle Le Jeu des ombres. » Une opération équivalente a également été menée pour le mobilier de la brasserie du TNP qui ne convenait plus à l’actuel directeur : une vente fut menée auprès des abonnés et quelques objets donnés.
Les outils informatiques en question
Une problématique plus spécifique se pose concernant l’informatique. « On a des appareils et des ordinateurs qui sont vraiment dysfonctionnels et un peu vieux, détaille Stéphanie Laude. L’idée est d’arriver à faire un tri dans ce qu’on va pouvoir donner en l’état et ce qui ne sert à rien, en lien avec Emmaüs Connect. »
S’il existe une filière dédiée à ce type de déchets et des bennes prévues à cet effet, pour mener une opération équivalente à celle des décors, la législation complique les choses. « Une des difficultés auxquelles on est confrontés concerne les données, complète-t-elle. En effet, toutes les unités centrales qui sont passées par les services de comptabilité et de paie ont des disques durs avec des données sensibles ; la législation nous impose de les détruire, car même en les formatant, elles demeurent récupérables. »
Au travers de ce partenariat avec l’Atelier Emmaüs de Villeurbanne, par les différentes ventes ou les dons proposés aux structures partenaires locales, le TNP souhaite s’engager toujours davantage dans la transition écologique et la transmission, allant vers un réemploi maximal des décors de théâtre, d’opéra et des scénographies d’exposition.
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Crédits photographiques : Jeanne Claudel
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