La vie n’est pas toujours un art
Après avoir obtenu de la juridiction prud’homale la requalification de leurs prestations en un contrat de travail, les participants à l’émission de télé-réalité « L’île de la tentation » ont voulu se faire reconnaître la qualité d’artistes-interprètes, en se prévalant de la Convention Collective des artistes-interprètes engagés pour des émissions de télévision du 30 décembre 1992, dont l’article 1.1 précise qu’il faut entendre, par artistes-interprètes, les personnes embauchées en qualité d’artistes dramatiques, lyriques, chorégraphiques, de variétés, cascadeurs, marionnettistes et artistes de chœurs.
La définition d’un artiste interprète est donnée par ailleurs par l’article L 212-1 du code de la propriété intellectuelle. Il s’agit d’une personne qui représente, chante, récite, déclame, joue ou exécute de toute autre manière une œuvre littéraire ou artistique, un numéro de variétés, de cirque ou de marionnettes.
Les participants à l’émission considéraient ainsi que relevait de cette catégorie la personne qui, participant à une manifestation destinée à un public et faisant appel à son talent personnel, exécutait une oeuvre, sous la conduite d’une mise en scène impliquant des jeux de physionomie et, le cas échéant, une interaction avec des partenaires.
Ils rappelaient que le fait, pour un acteur, d’être impliqué personnellement et d’interpréter son propre personnage n’était pas en soi de nature à faire échec à sa qualité d’artiste-interprète, un acteur pouvant interpréter son propre rôle ou une déclinaison, voire une caricature, de celui-ci.
Cependant, la Cour d’Appel leur a dénié cette qualité en relevant que si les intéressés devaient participer au tournage d’une émission qui comportait des éléments de scénarisation et des répétitions, afin de pouvoir répondre au format de l’émission déterminé par la société de production, les candidats n’avaient pas eu à jouer de rôle, ni à interpréter une œuvre, ni à faire preuve de création ni d’imagination et qu’ils devaient simplement exécuter une activité imposée, le caractère artificiel des situations filmées et leur enchainement ne suffisant pas à leur conférer la qualité d’acteurs.
Cette décision vient d’être récemment approuvée par la Cour de Cassation.
Si la vie est un art, elle ne constitue pas pour autant une œuvre. Pas d’œuvre, pas d’acteur !
Maître Thibaut CASATI
Avocat au barreau de Paris