la « douce colère » des intermittents
L’été fut chaud sur le front social : partout, ou presque, ceux que la presse appelle couramment les « intermittents en colère » ont donné de la voix. Le Larousse nous dit que la colère est « une irritation, un vif mécontentement parfois accompagné de réactions violentes ». Pour les philosophes antiques, elle est une « passion ». Et chacun sait qu’il faut se méfier de ses passions. Une passion manifeste, en opposition à la raison, une perte de la maîtrise de soi. Ne dit-on pas que « la colère est mauvaise conseillère » ou encore un « péché capital » ? Mais Aristote, à l’inverse des stoïciens et des épicuriens, réhabilite la colère : « Il y a de la raison dans la colère, non point que la raison commande, mais elle met en lumière l’injustice. La colère, dans une certaine mesure, écoute la raison. » Voilà le moteur de la colère : l’injustice et son cortège de mépris, dédain, vexation, outrage. Que produit, a contrario, la justice ? Chez Bodin, Thémis (la justice) a trois filles : Eunomia (le droit), Epieikeia (l’équité), et Eirené (la paix). On comprend alors peut-être mieux Homère qui file en quelque sorte l’oxymore de la « douce colère » quand il évoque celle d’Achille : « La colère qui monte dans le cœur de l’homme est beaucoup plus douce que le miel qui coule goutte à goutte. » Bien vu Homère…