Krzysztof Zanussi : « Nous autres Européens ne sommes manifestement pas prêts à partager avec les autres »

Krzysztof Zanussi : « Nous autres Européens ne sommes manifestement pas prêts à partager avec les autres »
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Corpo estraneo, le nouveau film du maestro polonais Krzysztof Zanussi, coproduction qui a réuni la Pologne, l’Italie ainsi que la Russie, et dont la sortie italienne eut lieu il y a deux jours, est un drame psychologique sur la crise actuelle des valeurs, culturelles et religieuses. Camillo De Marco a rencontré Krzysztof Zanussi à l’occasion du 17e Festival du cinéma européen de Lecce, dont les organisateurs ont voulu lui décerner un Olivier d’or pour l’ensemble de sa carrière.

S’il est une constante dans votre oeuvre, c’est bien la remise en question de toute forme de certitude : politique, sociale, religieuse…

Les certitudes sont toujours dangereuses ; elles sont la marque d’un esprit torturé. Un homme ne peut se considérer vivant que s’il sait remettre en cause ses certitudes – ce qui ne veut pas dire qu’il faut cultiver le doute, qui relève de l’enquête.

Même dans le champ de la religion,  une foi trop assurée est dangereuse. Au contraire, la foi doit sans arrêt être interrogée et mise à l’épreuve.

Votre héros, Angelo, est un chrétien fervent qui se fait embaucher à Varsovie par une multinationale.

De l’autre côté du spectre, il y a une troupe de femmes émancipées qui dépassent les hommes en cynisme et en brutalité. Le produit de la confrontation des deux est une sorte d’équilibre : l’idéalisme vacille parfois bien que guidé par le dieu qui le gouverne, mais le cynisme aussi faiblit de temps en temps.

À travers votre société, TOR Film Studio, vous avez aussi produit Game Count, le nouveau film d’Agnieszka Holland, un thriller adapté d’un roman d’Olga Tokarczuk.

C’est un film difficile et audacieux qui a réuni les efforts de cinq pays européens : la Pologne, la Suède, l’Allemagne, la République tchèque et la Slovaquie. Nous espérons que cette conjonction de nos forces va nous permettre de bien promouvoir le film et de le distribuer dans plusieurs pays.

Pensez-vous que l’unité européenne soit en crise ?

L’Europe nous a fait faire de grands pas en avant ; c’est bien qu’il y a une certaine unité. Elle s’ancre notamment dans la culture chrétienne, même si celle-ci est moins prononcée qu’avant.

En attendant, on érige des murs pour fermer le passage aux migrants…

Nous autres Européens nous sommes habitués à un certain niveau de confort que nous ne sommes manifestement pas prêts à partager avec les autres. Il va devenir important de bien réfléchir à la mesure de notre générosité.

Camillo DE MARCO

Source partenaire : Cineuropa.
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