Jean-Louis Cadoré : un chant au-delà du désenchantement contemporain
Après La solitude au fond des golfes clairs et Patchwork, l’auteur, compositeur et interprète Jean-Louis Cadoré sort un nouvel album, Un Chant, quinze titres enregistrés à Marseille au studio Le piège à sons et produits par G-Pods.
Critique de la société de consommation, orgueil et vanité des choix humains, inégalités abyssales, rêves enfouis mais criant toujours… Le chanteur nous livre une œuvre à la nostalgie communicative. Quand l’impuissance menace, le chant peut apparaître dans toute sa nécessité.
« Et moi qui ne bouge pas dans mon fauteuil de cuir.
Chaque fois que je tends les bras
ils sont trop courts
et c’est bien pire »
Gravité et sobriété
Ces quinze titres résonnent avec plus de gravité que les précédents. Place ici à une précieuse sobriété musicale, presque silencieuse, à la Georges Moustaki. Guitare et piano s’effacent souvent humblement derrière les mots de Jean-Louis Cadoré, soutenus de quelques notes subtiles de violoncelle ou de contrebasse.
Les pizz’ profonds de cette dernière accompagnent de leur groove la guitare, en hommage aux stars cubaines, Compay Segundo et Ibrahim Ferrer, tandis que l’arco de la contrebasse, dans « anti ode au réchauffement climatique » et lors du duo avec Dyne, « il y a longtemps », colore de toute sa profondeur la complainte ternaire des deux amants.
Pas de temps à perdre, il faut chanter !
Le verbe se fait plus explicite, marqueur de l’urgence de dire, de l’impossibilité même de jouer avec les mots quand les temps sont si durs : « ce monde est plus que ridicule » et « un espoir qui ne naît pas ».
En filigrane se dessinent toujours les racines de Jean-Louis Cadoré : Jean Ferrat, Georges Brassens et « les passantes », Alain Barrière et ses inflexions si particulières, mais avec un positionnement délibérément narratif, arrimé au rythme d’une prose qui se déploie généreusement.
La voix de Jean-Louis Cadoré, burinée par les épreuves de notre temps, trouve le chemin pour se donner encore et encore, au-delà du désenchantement contemporain. L’espoir n’est-il pas de chanter, quand le forfait de l’impuissance menace de nous taire ?
Laurie AMONT
Un Chant de Jean-Louis Cadoré est disponible depuis le 3 septembre 2018 chez G-Pods Production (22 €)
Crédits photographiques : Lucas Cadoré