Innover en cœur de ville : quels moteurs de développement ?
À l’initiative du ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales et du ministère de la culture, le Commissariat général à l’égalité des territoires a organisé, le 19 mars, à la Cité de l’architecture et du patrimoine, à Paris, la deuxième rencontre nationale du programme “Action cœur de ville”. Son thème : innovations urbaines et territoires.
Compte-rendu 1/3
« Les cœurs de villes sont malades. » Derrière ce constat, l’académicien Erik Orsenna, qui se désole « de la fermeture des commerces de proximité les uns après les autres » dans une petite ville de Bretagne, souligne l’enjeu majeur de cette rencontre : « Nos villes ont besoin d’actes volontaires, il faut redonner aux gens l’envie d’y venir et d’y vivre. »
Pour retrouver cette « envie », le Commissariat général à l’égalité des territoires a invité, lors de la deuxième rencontre nationale du programme “Action cœur de ville”, élus et professionnels à venir partager leurs expériences et réflexions sur un thème : “Innovations urbaines en cœur de villes”. Autrement dit, celui, éminemment culturel, de l’urbanisme, de l’architecture et du patrimoine.
« Chaque ville peut et doit avoir un lieu de culture, car l’attractivité d’un territoire tient d’abord à sa richesse culturelle, plaide Franck Riester. Nous devons réinvestir le patrimoine, en faire un patrimoine vivant, encourager la création architecturale contemporaine, rénover le bâti, revitaliser le commerce et créer des dynamiques vertueuses, reconquérir l’espace public, réinventer les lieux désaffectés. » Le ministre de la culture annonce le renforcement de plusieurs dispositifs : « Je souhaite que les bibliothèques et les médiathèques, têtes de pont culturelles dans les territoires, étendent leur offre. Je souhaite également le déploiement partout en France des Micro-folies. Et nous allons expérimenter la création d’un nouveau dispositif : les quartiers créatifs ».
Innover en cœur de ville : quels moteurs de développement ?
Habitat, éducation, culture ? Quel moteur est-il le plus à même de « faire pulser le cœur des villes » ? interroge Francis Rambert, directeur de la création architecturale à la Cité de l’architecture et du patrimoine. « Il faut tout choisir et travailler en transversalité, répond Caroline Cayeux, maire de Beauvais, présidente de Villes de France. La complémentarité est indispensable. Nous ne pouvons pas développer nos villes si nous n’avons pas une offre plurielle. Toutes les études d’impact montrent que nos habitants, tout en étant conscients d’un déficit de services, plébiscitent les villes moyennes. »
Bernard Blanc, président du Lieu ouvert à la coopération pour l’innovation (LOCI), évoque l’expérience menée à Loupiac, « laboratoire puissant », en Gironde en matière de logement : « On part d’entrée de jeu sur la question du lieu et du lien, autrement dit, de la forme et de l’identité. On parle de paysage et non d’architecture et on embarque les citoyens dans notre questionnement ». Pour Henri Bava, paysagiste, Grand Prix de l’urbanisme, « travailler sur des sites implique de regarder tout autour, de prendre en compte la géographie, les sols, l’air, de faire en sorte par exemple que la ville soit attirante depuis ses rives. L’innovation passe par la question environnementale ».
Marc Barani, Grand Prix de l’architecture, revient sur l’idée de projet à partir de l’exemple de Mouans-Sartoux, commune de 10 000 habitants située entre Cannes et Grasse, pour laquelle il a réalisé en 1998 des « Ateliers pédagogiques » : « À partir du moment où la commune est devenue propriétaire du château, une médiathèque a été construite, des projets artistiques ont vu le jour. Petit à petit, la commune est devenue autre chose qu’une cité dortoir. Au centre de cette histoire, il y avait cette notion de projet ».
Penser l’innovation, c’est d’abord se départir de l’idée de « modèle », selon Olivier Bouba-Olga, chercheur en sciences sociales. « Dans les années 90, on ne jurait que par la formule “small is beautifull”, puis est venu un modèle inspiré des pôles de compétitivité de la Silicon Valley, et aujourd’hui un modèle prônant majoritairement un soutien aux seules métropoles. Quand on cartographie la performance, il n’y a cependant pas d’opposition entre les grandes et les petites villes », explique-t-il. Autre impératif : arrêter pour les villes de se percevoir en rivalité. « Il faut plutôt penser en termes de méthodes d’identification des problématiques à traiter, de complémentarité et de mutualisation des ressources ».
À suivre…
Source : culturegouv