Et si la culture était le remède à la crise ?
Plusieurs études qui viennent de paraître vont dans ce sens : oui, la culture est un véritable remède à la crise ! À Profession Spectacle, nous n’avions pas besoin d’elles pour en être convaincus, mais les chiffres donnés apportent de l’eau à notre moulin.
Amis artistes, techniciens, directeurs de salles, vous êtes la clé de la reprise – ou, en tout cas, vous êtes en bonne place dans le trousseau pour y arriver ! Cela fait bien longtemps que Profession Spectacle y croit dur comme fer et le répète, article après article, sans en avoir toutefois la preuve chiffrée. Alors, maintenant que des études le confirment, on ne va pas se priver pour s’en faire l’écho.
Dans son enquête fondée sur des chiffres de 2013, France Créative révèle ainsi le dynamisme du secteur culturel en France, avec une croissance qui atteint les 1,2 %, contre 0,9 % pour le reste de l’économie. Un bon chiffre au regard de la crise qui frappe le pays depuis 2008, sans mentionner les coupes franches qui rognent régulièrement ce secteur. On apprend également que les industries culturelles génèrent annuellement un chiffre d’affaires direct de 73 milliards d’euros, et de 84 milliards d’euros de manière indirecte. Pour vous donner un ordre d’idée, cela représente près de 20 % du budget de l’État pour 2016. Pas mal tout de même !
Infographie.
Notons tout de même que cette étude englobe les industries culturelles dans leur ensemble, avec notamment les grands groupes de communication, de télévision, ou encore ceux des jeux vidéo. Mais le spectacle vivant n’est pas en reste, avec 7,9 milliards d’euros de revenus.
La crise, ce n’est cependant pas que des milliards d’euros et des taux de croissance. Notre président en a fait sa marotte : c’est aussi et surtout de l’emploi. Dans ce domaine là aussi, les indicateurs sont au vert : les secteurs de la culture et de la création représentent 1,3 million d’emplois. C’est presque 5 % de l’emploi intérieur total français, avec près de 1000 métiers différents qui se répartissent entre la création (52 %), la diffusion (28 %) et la production (20 %).
Autre spécificité : ces emplois font la part belle aux jeunes et sont pour la plupart non délocalisables. Nos spectacles et nos créations ne peuvent pas sortir d’usines taïwanaises ou chinoises, et c’est tant mieux.
Les ventes de smartphones et tablettes explosent ? Merci les créateurs !
Comme une manière d’enfoncer le clou, l’Unesco y est allée elle aussi de son rapport. Après avoir révélé que les secteurs culturels et créatifs dans le monde ont réalisé en 2013 un chiffre d’affaires de 2 250 milliards de dollars, soit 3 % du produit intérieur brut mondial et 1,5 fois plus que les services de télécommunication, l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture rappelle ce qui peut paraître évident : si les smartphones et tablettes se vendent comme des petits pains, c’est qu’il y a derrière des offres de contenus qui intéressent les consommateurs, des contenus culturels notamment. Sans aborder la question de la qualité, ni le problème que pose la triste manière dont sont fabriqués ces objets, le constat est là.
Même phénomène pour le tourisme : Paris ne serait plus Paris sans ses très nombreux spectacles. Qui en profite d’abord ? Tous les professionnels du tourisme ou de l’immobilier.
Mais attention, l’autosatisfaction s’arrête là ! Car les créateurs sont en danger, en France comme ailleurs, révèle l’Unesco. Le cas le plus médiatique concerne la musique. Comment rémunérer le compositeur ou l’interprète d’un morceau, quand le titre circule librement sur internet ? L’Unesco appelle à « améliorer la monétisation en ligne ». Des réflexions sont actuellement en cours, en France, pour trouver un meilleur équilibre dans le partage des recettes… mais le chemin semble encore très long. Des pistes de réflexion existent, comme l’élargissement du droit de suite, qui permet à un artiste de toucher un pourcentage si l’une des œuvres qu’il a vendues est ensuite revendue beaucoup plus cher, ou comme la généralisation d’un droit compensation en échange du droit à la copie privée, pas encore reconnu dans tous les pays.
Pour y arriver, encore faudrait-il que tout le monde s’accorde. On est bien loin d’un COP 21 de la culture ou d’un Grenelle du spectacle vivant, mais on peut rêver non ?
Jacques GUILLOUX