Employeurs, intermittents et artistes : TOUT comprendre du prélèvement à la source
En juin 2018, Profession Spectacle publiait un premier article expliquant, à partir des éléments alors parus officiellement, comme le prélèvement à la source (PAS) allait s’appliquer aux artistes et intermittents du spectacle. Des précisions ont évidemment été apportées depuis, l’occasion pour notre journal, en partenariat avec le Chèque Intermittents, de répondre à un grand nombre de vos questions.
Le prélèvement à la source (PAS) est en vigueur depuis le 1er janvier 2019. Les employeurs doivent dorénavant collecter l’impôt sur le revenu des personnes physiques (IRPP) directement sur le bulletin de leurs salariés.
Depuis plusieurs mois déjà, les contribuables sont sensibilisés au sujet du prélèvement à la source, sur son principe et son fonctionnement. Et l’administration fiscale comme les professionnels de la paye accompagnent les contribuables et répondent à leurs interrogations (lien vers l’article précédent).
Même s’il est difficile d’échapper aux nombreuses explications sur le principe de collecte mise en place avec le prélèvement à la source (cf. illustration) ainsi que les taux personnalisés, individualisés et non personnalisés, tous les employeurs ne sont pas des professionnels de la paye, et se posent légitimement un certain nombre de questions, d’ordre pratique notamment.
Un employeur du spectacle nous interroge…
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Le principe du PAS, les différents taux, le démarrage au 1er janvier 2019, j’ai compris. Mais concrètement, en tant qu’employeur, que dois-je faire ?
En qualité d’employeur, vos obligations sont au nombre de quatre :
1. appliquer le taux transmis par la Direction générale des finances publiques (DGFiP)
2. retenir le prélèvement à la source sur le salaire net à verser au titre du mois M, en appliquant le taux au salaire net imposable ;
3. déclarer les montants prélevés pour chaque bénéficiaire de revenus ;
4. reverser en M+1 à la DGFiP les prélèvements à la source du mois M.
En effet, cela paraît finalement assez simple. Mais quand vous me dites d’appliquer le taux transmis par la DGFiP, puis-je appliquer le taux qu’un salarié me communique directement ?
Non. Vous devez uniquement prendre en compte les taux de PAS transmis par la DGFiP. De manière générale, il n’y a aucune interaction pour le PAS entre votre salarié et vous.
Même si votre salarié est de bonne foi, qu’il vous apporte un justificatif du taux que lui a transmis la DGFiP, vous ne devez pas l’appliquer. Vous avez la responsabilité d’appliquer le taux transmis par la DGFiP, et uniquement celui-ci, en respectant son délai de validité. En cas de non-respect de cette obligation, vous engagez votre responsabilité et vous vous exposez à des sanctions.
Comment réagir alors face à un salarié qui conteste le taux que je lui applique ?
La seule chose que vous puissiez faire est de l’inviter à contacter directement son centre des impôts. Comme nous l’avons vu précédemment, vous ne pouvez pas appliquer un autre taux que celui communiqué par la DGFiP, ni être un médiateur entre le service des impôts et votre salarié.
Si je n’ai pas le droit d’appliquer le taux communiqué par un salarié et que la DGFiP ne m’en transmet pas, quel taux vais-je devoir appliquer ?
Lorsque vous ne disposez pas du taux personnalisé de votre salarié, vous devez quand même procéder au prélèvement à la source sur le salaire que vous lui versez en appliquant le taux non personnalisé.
Mais le taux non personnalisé est en général défavorable au salarié. Dois-je faire une régularisation de PAS lorsque la DGFiP me transmet le taux personnalisé ?
Non, aucune régularisation n’est à faire. En effet, l’application du taux non personnalisé n’est pas une erreur car le taux appliqué au moment du versement du revenu correspondant était exact au regard des informations que vous déteniez.
N’existe-t-il pas alors un autre moyen d’obtenir le taux personnalisé, notamment lorsque j’embauche un salarié ?
Si, une solution existe, elle s’appelle Topaze. C’est un logiciel qui vous permettra de demander le taux de PAS de votre salarié dès son embauche. Vous pourrez ainsi lui appliquer son taux personnalisé dès sa première paye.
D’accord pour le taux, mais à quelle somme vais-je devoir l’appliquer ?
L’assiette du PAS n’est autre que le revenu net imposable déjà bien connu des gestionnaires de paye. C’est ce montant qui était communiqué chaque année à la DGFiP pour pré-remplir les déclarations d’impôt.
Un cas particulier existe toutefois pour les contrats de moins de deux mois pour qui vous n’auriez pas de taux personnalisé et à qui serait appliqué le taux non personnalisé par défaut. Dans ce cas, le revenu net imposable serait abattu d’un demi-SMIC net (615 euros en 2018).
Et comment cela va se passer en cas d’erreur de calcul du PAS ?
En cas d’erreur dans le calcul, la déclaration ou le versement du PAS, vous êtes responsable, de la même manière que pour les cotisations sociales. Vous pourrez donc, en cas d’erreur dans le calcul du PAS, être tenu de régulariser le prélèvement à la source.
Toutefois, ces erreurs devraient être assez rares. En effet, comme nous l’avons vu, les conditions de détermination du taux sont assez clairement définies, à défaut d’être simples. L’assiette du PAS, le revenu net imposable, est, quant à elle, une notion déjà bien connue des gestionnaires de paye et ne devrait pas poser de problèmes particuliers.
J’ai l’habitude de négocier des salaires nets, comment cela va-t-il se passer avec le prélèvement à la source ?
Nous vous déconseillons vivement de négocier du salaire net payé, donc après impôt. En effet, au moment de la signature du contrat, vous ne connaissez pas le taux de prélèvement à la source de votre futur salarié et ne pouvez donc pas déterminer le montant du salaire à contractualiser et notamment s’il respecte les minimum conventionnels.
Vous pourrez négocier un salaire net avant impôt qui se rapproche plus de ce que vous aviez l’habitude de négocier avant le prélèvement à la source, mais ce montant ne correspondra pas au salaire versé.
Dans certains cas, pour mes salariés intermittents, je versais à l’issue de la prestation de travail un acompte du montant du salaire net, en attendant la réalisation de la fiche de paye.
Le versement d’un acompte est toujours possible, mais vous ne connaîtrez pas précisément le montant du PAS et donc le montant du salaire net versé. Vous devrez donc verser un acompte partiel pour prendre en compte le montant éventuel du PAS. Le solde du salaire pourra alors être versé après l’édition de la fiche de paye.
Et comment cela se passe t-il quand je dois verser un complément de salaire après la réalisation d’un premier bulletin ?
De manière générale, le taux PAS applicable est celui en vigueur au moment du versement. Lorsqu’un complément de salaire est versé plusieurs mois après une paye initiale, le taux applicable est celui en vigueur au moment du versement de ce complément. Il peut donc être différent du taux appliqué sur le bulletin de paye initial. Ce taux ne s’applique qu’au complément de salaire.
On parle de 2018 comme d’une année blanche. Qu’est-ce que cela signifie ?
Afin de ne pas payer deux fois l’impôt en 2019, sur les revenus 2018 et 2019, l’impôt sur les revenus 2018 sera compensé par le « CIMR » (Crédit d’Impôt Modernisation du Recouvrement). Seuls les revenus exceptionnels versés en 2018 resteront assujettis à l’impôt sur le revenu.
Et qu’est-ce qu’un revenu exceptionnel ?
Les revenus exceptionnels resteront imposés en 2019, selon les modalités habituelles. De manière générale, il s’agit de tout revenu qui, par sa nature, n’est pas susceptible d’être recueilli annuellement. Il s’agit notamment :
- des indemnités de rupture du contrat de travail (pour leur fraction imposable uniquement) – les indemnités de fin de CDD ou de missions (primes de précarité) ouvriront bien droit, en revanche, au bénéfice du crédit d’impôt modernisation du recouvrement ;
- des indemnités, allocations et primes versées en vue de dédommager leurs bénéficiaires d’un changement de résidence ou de lieu de travail ;
- des sommes perçues au titre de la participation ou de l’intéressement et non affectées à la réalisation de plans d’épargne entreprise (PEE, PERCO) ou retirées d’un plan d’épargne en dehors des cas légaux de déblocage des sommes ;
- de la monétisation de droits inscrits sur un compte épargne temps pour ceux qui excèdent 10 jours (en-deçà de cette durée, ces revenus sont donc considérés comme non exceptionnels et bénéficient de l’effacement de l’impôt correspondant) ;
- des gratifications surérogatoires, quelle que soit la dénomination retenue par l’employeur. Les gratifications surérogatoires sont des gratifications accordées sans lien avec le contrat de travail ou le mandat social ou allant au-delà de ce qu’ils prévoient, quelle que soit la définition retenue. Il s’agit de sommes sans rapport direct avec l’activité et la performance et dont le montant et le versement revêtent par conséquent un caractère discrétionnaire.
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Dans ce cas, dois-je indiquer à mes salariés quelles sommes sont assimilées à des revenus exceptionnels ?
Non, les contribuables sont seuls responsables de la qualification des sommes qu’ils ont perçues. Vous n’avez pas à identifier les revenus exceptionnels pour en communiquer le montant à vos salariés.
Une fois que le prélèvement à la source a été fait sur le bulletin de salaire, que se passe-t-il ?
Les informations relatives au prélèvement à la source (revenu imposable, taux PAS, montant du prélèvement, etc.) sont déclarées par DSN à la DGFiP. Puis les montants de PAS sont prélevés sur le compte de l’employeur par la DGFiP le 8 ou 18 du mois suivant, selon la taille de l’entreprise.
Article réalisé en partenariat avec le Chèque Intermittent.
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