“Et je choisis de vivre” : documentaire initiatique sur le perte d’un enfant et le travail de deuil
Ce documentaire initiatique sur le deuil est une petite lumière pleine d’humanité qui nous rappelle à quel point la société a oublié le sens de la communauté, son rôle dans les déchirures intérieures, si faciles à dépasser quand les bras des autres sont ouverts. En salles ce mercredi 5 juin.
Le sujet du deuil est assez rare au cinéma. Peu alléchant, il nous concerne tous, malheureusement ou heureusement.
Amande a vécu cette épreuve du deuil avec Guillaume, son compagnon. Ils ont perdu Gaspar la veille de son premier anniversaire. Elle décide alors de se mettre en marche, à travers les montagnes de la Drôme, pour rencontrer des personnes susceptibles de l’aider ou de lui faire part de leur témoignage de résilience.
Cet itinéraire se veut initiatique pour faire face au vide de réponses du couple. À l’hôpital, peu d’accompagnement ; dehors, le malaise des amis et des proches qui ne savent pas comment parler. L’émotion et la souffrance peuvent désarmer ceux qui la vivent, comme ceux qui sont en face. Et pourtant, toute société a son lot de rituels face au deuil. Pourquoi les a-t-on oubliés?
« Demain dès l’aube, je partirai »
Plongés dans le quotidien de la jeune femme, nous savons que son sourire n’est qu’apparent. Elle porte encore la blessure de ne pas tenir dans ses bras l’enfant qu’elle a porté. Dans sa salle de classe, institutrice, elle raconte une fable à des enfants sur le deuil. Elle voudrait croire qu’on peut ressusciter les morts… Son ami Nans Thomassey, co-réalisateur du film, décide d’intervenir et de lui préparer un parcours en montagne avec un âne. À travers la nature, les échanges, les débordements d’émotion, le travail commence enfin à se faire. Des mères lui racontent leur parcours après avoir vécu la même chose qu’elle. Elles sont devenues lumineuses et tournées vers les autres. Le couple Clermont, auteur de Gaspard, entre terre et ciel, et leurs enfants témoignent aussi, après un spécialiste du deuil et un passage rituel dans une grotte avec une sorte de chaman.
C’est une confrontation à la douleur mais aussi à l’appel de la vie, encore difficile. Mais le documentaire apparaît surtout comme un rappel de l’importance de vivre son deuil et de ne pas penser qu’oublier suffit. Faire son deuil n’existe visiblement pas. C’est un chemin pérenne. Beau et nécessaire.
On pense immanquablement au poème de Victor Hugo, écrit à la suite de la mort de sa fille :
« Demain, dès l’aube, à l’heure où blanchit la campagne,
Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m’attends.
J’irai par la forêt, j’irai par la montagne.
Je ne puis demeurer loin de toi plus longtemps.
[…]
Et quand j’arriverai, je mettrai sur ta tombe
Un bouquet de houx vert et de bruyère en fleur. »
Ce documentaire n’est pas pour livrer un mode d’emploi réglementaire sur le deuil. C’est, sous la forme de reportage scénarisé et authentique, une main tendue à d’autres pour oser vivre un deuil comme il faut, et vivre ensuite, plus convaincu encore de la valeur d’une vie – de la sienne avant tout. En proposant de montrer différentes étapes d’une jeune mère après la perte d’un enfant et de parler de la douleur, les réalisateurs permettent en quelque sorte de crever un abcès plein de tabous pour mieux ouvrir à autre chose.
* L’équipe du film a par ailleurs créé une plateforme en ligne, qui rassemble toutes les initiatives nationales et le fruit de leur expérience, pour aider davantage de personnes en situation de deuil.
Nans Thomassey et Damien Boyer, Et je choisis de vivre, France, 2019, 70mn
Sortie : 5 juin 2019
Genre : documentaire
Classification : tous publics
Distribution : MauRéfilms et Orawa Prod
En savoir plus sur le film : Et je choisis de vivre
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