Serge Reggiani, monument de la chanson française, fête ses 100 ans
Mort le 22 juillet 2004, à 82 ans, Serge Reggiani aurait atteint son premier centenaire aujourd’hui. Né en Italie le 2 mai 1922, il commence par une carrière d’acteur, sur les planches comme à l’écran, avant de devenir un des plus grands noms de la chanson française. Nous lui rendons hommage, avec un TOP 5 (très) subjectif de ses meilleures chansons.
Après un début prolifique comme acteur au théâtre dès le début des années 1940, puis au cinéma, il faut attendre 1965 pour que Serge Reggiani se lance enfin dans la chanson, âgé de quarante-deux ans, avec un premier album consacré à Boris Vian. Mais Reggiani rattrape le temps perdu et sort presque un album par an jusqu’à la fin des années 1990, devenant ce monument de la chanson française, à la voix profonde et émouvante, au regard tendre et mélancolique.
« Acteur ou chanteur, c’est un état d’aventurier. Rien n’est jamais certain, rien n’est jamais clair. On n’a jamais fini d’apprendre », disait-il humblement.
Retour sur la discographie de l’artiste franco-italien, à travers un TOP 5, subjectif bien sûr, de ses meilleures chansons.
5/ Les mensonges d’un père à son fils (1972)
« Le temps, petit Simon,
Où tu m’arrivais à la taille
Ça me semble encore tout à l’heure
Mais déjà, tu m’arrives au cœur
Pour toi, commence la bataille »
Cette chanson douce-amère figure très rarement dans les tops de son répertoire. Et pourtant, la qualité du texte signé Jean-Loup Dabadie et l’interprétation impeccable de Serge Reggiani en font, à nos yeux, un de ses titres incontournables.
Comment ne pas s’identifier à ce père qui, dans un désir de protection un peu hypocrite, tente d’expliquer la vie à son fils, en lui cachant ses peines et ses désillusions ? « Tu verras, on rit bien sur la terre », affirme-t-il, tout en demandant régulièrement à son enfant de le resservir en alcool.
Si la paternité est l’un des thèmes récurrents de son œuvre (« Mon petit garçon », « Ma fille »), c’est la seule fois où Reggiani s’adresse directement à son fils en citant son prénom, Simon, alors âgé de onze ans.
4/ L’homme fossile (1968)
« Ils ont dit que j’vivais jadis dans une grotte
Ils ont dit tellement d’choses, tellement de trucs curieux
Que j’étais couvert de poils et que j’avais pas de culotte
Alors que j’habitais un pavillon d’banlieue »
Parce que Reggiani ne rime pas toujours avec mélancolie, voici la petite touche d’humour de ce top ! Écrite par Pierre Tisserand, cette chanson au rythme entraînant raconte de manière loufoque la découverte d’ossements préhistoriques par des scientifiques, découverte racontée par le cadavre lui-même.
Mais contrairement à d’autres titres purement comiques, comme « Arthur, où t’as mis le corps », « L’homme fossile » conclut avec cynisme, dénonçant, en sous-texte, la course à l’armement nucléaire et la nature humaine belliqueuse.
3/ Madame Nostalgie (1968)
« Madame Nostalgie
Depuis le temps que tu m’accables
J’ai envie d’envoyer au diable
Ton mal d’amour si mal guéri »
« Madame Nostalgie » est l’une des plus célèbres réussites de l’artiste, nées de la collaboration entre Serge Reggiani et Georges Moustaki qui en a écrit les paroles. Les deux hommes se sont rencontrés grâce à Barbara et deviendront des amis très proches.
Moustaki confie : « Serge a été un tournant dans ma vie. Je sortais d’un long passage à vide. Je n’écrivais pratiquement plus. Il a été pour moi un stimulant qui a donné naissance à “Madame Nostalgie”, “Ma liberté”, “Le Métèque”. »
Cette chanson est un hommage à Barbara, elle qui prit Reggiani sous son aile au début de sa carrière sur scène.
2/ Ma liberté (1967)
« Ma liberté
Toi qui m’as fait aimer
Même la solitude
Toi qui m’as fait sourire
Quand je voyais finir
Une belle aventure
Toi qui m’as protégé
Quand j’allais me cacher
Pour soigner mes blessures »
Également écrite par Georges Moustaki, ce petit bijou de la chanson française est l’une des plus célèbres de Reggiani et a connu de nombreuses reprises. Si la douce poésie qui émane de cette chanson nous permet si facilement de nous identifier, elle fait aussi écho à la vie de Serge Reggiani, lui que l’amour de la liberté a poussé à prendre ses distances avec le succès, tout en expérimentant toutes les voies d’expression possibles : le théâtre, le cinéma, la chanson et, en fin de carrière, la peinture.
1/ Votre fille a vingt ans (1968)
« Chacun de ses 20 ans pour vous a compté double
Vous connaissiez déjà tout ce qu’elle découvre
Vous avez oublié les choses qui la troublent
Madame, et vous troublaient aussi »
Encore un chef-d’œuvre signé Georges Moustaki ! Tiré de son troisième album, Et puis…, ce titre entremêle génialement la nostalgie du temps qui passe et la jeunesse insouciante, la vision tendre d’une mère sur son enfant et la cruauté des années dévastatrices.
Intemporellement superbe.
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