CLIP – “Range-toi” : Alba confronte le rêve aux réalités de ce monde
L’artiste franco-mexicaine vient de sortir un clip qui reprend et dénonce avec ironie le discours des « raisonnables » face aux rêveurs. Ce titre est le premier extrait d’un album prévu pour début 2022.
Après avoir sorti un EP en 2015 et un premier album en 2016, Alba est de retour avec le titre « Range-toi », sorti chez Sound an Vision, qui annonce son nouvel album – début 2022. Le titre, écrit et composé par l’artiste franco-mexicaine, a été réalisé par Karim Attoumane (CharlElie Couture, Emel Mathlouthi, Claire Days) au studio The Panic Room.
« Sans limite, tu crois que t’es une bombe
mais t’es une météorite sans conscience.
Tu te sers de la liberté
pour masquer ton insolence.
Sans patron, tu crois que t’es libre
mais t’es toujours aussi con. »
Dans ce clip à la lenteur assumée, comme une lancinante complainte qui n’est pas sans rappeler l’esthétique de la trap avec ses rythmes lents (voire très lents), Alba met face à face deux sociétés, sous la forme d’un conflit générationnel : les paroles sont mises dans la bouche des aînés qui voient dans les élans de liberté de la jeune génération une inconsistance intrinsèque, une immaturité fondamentale.
« Regarde ta place, joue pas au grand
Laisse parler les gens consistants
Travaille un peu et reviens quand tu seras vieillissant
Oublie tes rêves, ils sont trop grands
Laisse-les passer en t’inclinant
Grandis un peu et reviens quand tu seras moins pédant. »
Dans le pertinent clip réalisé par Jeanne Prigent, diplômée de l’École nationale du jeu et des médias interactifs numériques du CNAM, la génération de nos aînés est symbolisée par des visages lisses, sans caractéristique singulière, sans la moindre affirmation de soi, tandis que ceux qui se voient rabroués sont clairement personnalisés, à l’image de la liberté qu’ils revendiquent. Parmi eux, une personne à la barbe blanche, preuve que le conflit est faussement générationnel : ceux qui appellent à la raison ne sont pas vieux par l’âge, mais par le discours, l’absence de désir et la désillusion ; ils sont gavés de psychanalyse et de médicaments qui frappent le monde comme des bombes (mais que vient faire ce chien confortablement installé sur une pilule ?).
« Sèche tes larmes, sois un battant
La vie n’attend jamais les gens
On s’ra fier de toi quand tu seras vraiment résistant
Allez, petit, t’a rien compris
À vingt-cinq ans t’es abruti
Tu vois c’est tous tes rêves qui t’ont anéanti. »
Ce clip, portée par la délicieuse et envoûtante voix d’Alba (on n’en dira jamais assez de bien !), n’a finalement qu’un défaut : les paroles enfoncent des portes déjà ouvertes par bien des artistes auparavant. Si l’ironie frise ici non sans intelligence avec l’antiphrase, le texte aurait quant à lui mérité une approche plus profonde, pour gagner en originalité de langue et de propos.
« Allonge-toi sur ce vieux divan
Voilà deux-trois médicaments
Tu vois un peu faire que tous les rêves s’oublient en dormant. »
Alba ponctue sa chanson de deux interventions de Serge Gainsbourg, figure souvent considérée comme transgressive et dont les mots sont retournés dans le discours des « raisonnables ».
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