Guy Bedos : « Ne me parlez pas de Valls, j’ai envie de lui péter la gueule. »
Créé en 1974, le Brussels Film Festival a pris depuis 14 ans un tournant européen : 12 films en compétition d’un bout à l’autre de l’Europe pour cette édition 2016, et plus de 100 films présentés entre le 17 et le 24 juin. Mais la soirée d’ouverture a, contre toute attente, porté une double charge, financière tout d’abord, puis politique avec l’intervention de Guy Bedos. Avant que Volker Schlöndorff ne vienne porter un message d’espoir…
Un grand festival réduit à faire du crowdfunding
La majestueuse salle Flagey est comble ce vendredi 17 juin pour accueillir, dans sa douce lumière orangée, un public éclectique et détendu à l’occasion de la 14e édition du Brussels Film Festival ! Mais cette ambiance chaleureuse ne parvient pas à cacher l’angoisse budgétaire que l’on sent planer un peu partout, jusque dans le discours d’introduction du président Ivan Corbisier : « Nous nous sommes accrochés, car les subsides ont fondu depuis 3 ans, mais nous l’avons fait ! » Il rappelle le soutien des sponsors à hauteur de 50 000 euros. La crise frappe partout, y compris le plus gros festival cinématographique de la capitale européenne.
Et le président de nous faire un rapide énoncé des festivités à venir, outre les films en compétition : une leçon de cinéma par Volker Schondörff, une soirée festive en l’honneur de Guy Bedos, des séances en plein air sur la place Flagey, un ciné-concert au rythme de la fête de la musique, etc. Trois artistes sont invités pour cette performance… l’occasion de ponctuer par 3 fois son propos d’une sentence lourde de fierté et de crainte : « c’est gratuit ». Il n’est dès lors pas étonnant d’entendre Ivan Corbisier conclure par un appel au crowdfunding, une première pour un tel événement !
Guy Bedos : « Manuel Valls m’énerve, oui, je le dis ! »
L’arrivée de Guy Bedos sur le podium semble un temps détendre l’atmosphère, notamment grâce à un petit pas de danse qui n’était pas sans faire penser à son fameux sketch de la drague. Pince-sans-rire, l’humoriste qui vient de fêter ses 82 ans, tourne en dérision – avec légèreté – les problèmes budgétaires évoqués précédemment. Mais c’est pour porter une autre charge…
C’est en effet sur un ton provocateur et grave qu’il achève son intervention, par un véritable anathème : « Ne me parlez pas de Valls, j’ai envie de lui péter la gueule. Je suis un homme de gauche, je ne me reconnais pas dans ce type-là ! » Rires et applaudissements de la salle, infiniment réceptive tout au long de cette soirée.
« Je suis très ouvert, on mélange tout. Je suis complètement hostile aux Orientaux qui foutent le bordel, qui ont tué tous ces gens. Les terroristes, ce sont pas mes amis, mais je suis antiraciste obsessionnel ! Et M. Manuel Valls, qui parle des Corses, des Roms, etc. Or lui-même est Catalan, il a été naturalisé à 17 ans. Y’en a qui sont plus français que les Français !
Et il m’énerve, oui, je le dis !
Je défends les migrants, je suis un homme de gauche, un vrai, je bosse avec les associations, on fait tout pour qu’ils soient accueillis, ce n’est pas facile. Je suis allé à Calais : ce sont des jeunes, femmes, enfants, qui suivent le père parfois, pour fuir les carnages qui ont lieu dans leur pays. Je ne comprends pas que les politiques n’entendent pas ça ! »
Volker Schlöndorff : « Le cinéma européen n’est pas mort ! »
Le réalisateur Volker Schlöndorff, qui lui succède, paraît d’un enthousiasme enfantin. Face aux angoisses, il répond par une vraie confiance dans le cinéma européen : « On l’a tellement dit mort, que c’est étonnant qu’il soit encore en vie ! Mais il est très vivant. Il survit grâce aux festivals, et grâce à internet. Jamais les gens n’ont vu autant de films, alors qu’en même temps, on dit que c’en est fini du cinéma de qualité. Mais ce n’en sera jamais fini ! »
Évoquant sa leçon de cinéma du lendemain, sur laquelle Profession Spectacle reviendra, il clôt sa petite communication par une note d’humour bienvenue : « En tout cas vous ne saurez pas faire du cinéma après ça ! »
Présentation faite des membres du jury, le festival s’ouvre enfin sur le premier film, hors-compétition et en avant-première, venu tout droit d’Italie : Folles de joie de Paolo Virzi, avec Valeria Bruni Tedeschi et Micaela Ramazzotti dans le rôle de deux femmes brisées atteintes de troubles psychologiques. Profession Spectacle ne manquera pas d’y revenir également.
Pauline ANGOT
ALBUM PHOTOS
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Crédits photo : Pierre Gelin-Monastier