Aujourd’hui, l’électro-rock envahit la nef de Saint-Eustache pour 36h !
Parmi toutes les festivités liées à la fête de la musique, il en est une particulièrement originale, qui se déroule en plein cœur de Paris : le festival des 36h de Saint-Eustache. Pour la onzième année consécutive, l’église située en bordure des Halles accueillera en effet, du lundi 20 juin à 13h au mardi 21 juin à 21h, une dizaine d’artistes de renommée internationale. Leur mission ? Revisiter une œuvre liturgique en faisant vivre la musique sacrée sous un angle insolite.
Rencontre avec Louis Robiche, régisseur de la paroisse, co-programmateur et responsable du festival depuis sa création.
1) Comment est né le festival des 36h de Saint-Eustache ?
Né il y a 11 ans, sur une idée du curé, le festival est un projet porté par la communauté paroissiale de Saint-Eustache, co-organisé avec le collectif Le Phar. Les paroissiens sont bénévoles pour faire l’accueil, préparer des gâteaux pour le catering des artistes, etc.
2) Pourquoi 36h ?
En lien avec la fête de la musique, le festival commence la veille (le 20 juin) et s’achève le 21 juin. Folk, rock, électro, musique sacrée : pendant 36 heures, riffs et samples côtoient chœurs et orgue dans l’église de Mozart, Lully, Rameau, Pierre Henry, Camille, Patti Smith, Keith Haring…
3) L’événement a lieu dans l’église : qu’apporte un tel cadre ?
Comme aime à le dire le père George, curé de Saint Eustache : « Dans un monde divisé, il faut des choses qui rassemblent. La musique en est une. Quelque chose qui nous dépasse, comme ces lieux ». Ce saint lieu nous invite à une expérience de communion inédite. La beauté et la grandeur de l’église, sans oublier l’acoustique exceptionnelle et la présence d’un grand orgue remarquable, magnifient encore plus les concerts ; tout cela porte les musiciens comme le public.
4) Vous mélangez folk, électro, rock et musique sacrée… Les arts profanes sont désormais admis dans le sanctuaire : pourquoi un tel changement ?
L’église a toujours eu le rôle d’accueillir, d’être ouverte. Saint-Eustache en est un bel exemple par l’accueil qu’elle fait depuis des décennies aux malades du sida (groupe sida-vie spirituelle), par son soutien aux plus démunis (soupe), etc. Le fait d’y jouer de la musique électro-rock, plutôt réservée aux clubs ou aux salles de concert habituellement, permet de faire venir un public qui n’est pas forcément familier des églises, qui peut-être n’a jamais mis les pieds dans une église : c’est l’occasion de l’y inviter !
Faire de l’église un lieu de rassemblement pour célébrer le beau… Qu’il soit croyant ou non, catholique ou d’une autre religion, personne ne reste insensible à ce lieu, qui n’est pas commun pour un concert de musique actuelle. Cela questionne parfois les spectateurs, les interpelle. C’est une manière de les familiariser avec la maison de Dieu, de la rendre accessible par le biais de la musique.
5) L’Église catholique, grand mécène par le passé, a-t-elle encore un rôle à jouer dans la culture ?
En tout cas, l’Église n’a pas à rester en dehors, déconnectée de ce que produisent les artistes. Le fait que la programmation du festival 36h soit si pointue dans le champ culturel de l’électro-rock-indé est simplement le travail de jeunes chrétiens qui aiment la musique de leur temps et ont envie de la faire vivre et de montrer des talents.
6) Comment sélectionnez-vous les artistes ? Leur foi ou votre lecture spirituelle de leur art entrent-ils en compte ?
La sélection est faite par amour pour la musique, sur des critères d’affinité, de qualité, d’envie. Les croyances des artistes ne rentrent absolument pas en compte dans les choix de programmation. En revanche, il y a un fil rouge, dont le principe est exposé à tous les artistes programmés : il leur est proposé d’interpréter une œuvre liturgique… « Liturgy Revisited » ! Chaque artiste, chaque groupe revisite ainsi pendant son set une œuvre liturgique de son choix (gospel, requiem, ave maria, psaume, negro spiritual…), en la faisant vivre sous un angle insolite.
7) Quelles sont les innovations prévues cette année ?
Il n’y a pas d’innovation, mais les groupes ne sont jamais les mêmes d’une année sur l’autre. À noter notamment cette année, dans la sélection, une collaboration inédite entre Murcof et Vanessa Wagner.
8) Si un artiste veut présenter son dossier, comment doit-il procéder ?
C’est très simple ! Il peut contacter le festival via le site ou par l’intermédiaire des réseaux sociaux comme Facebook et Twitter. Ou encore mieux : venir rencontrer l’équipe le 20 juin lors du festival !
Propos recueillis par Nadège POTHIER