7 mars 1883 : Mily Balakirev, la mante religieuse du Caucase
Instant classique – 7 mars 1883… 136 ans jour pour jour. Mily Balakirev (1837-1910) n’est pas le plus célèbre des compositeurs russes, en tout cas par ici, mais il eut un rôle essentiel dans l’évolution esthétique de la musique de son pays en étant notamment à l’origine, à 20 ans, du fameux groupe des Cinq (César Cui, Alexandre Borodine, Modeste Moussorgski, Nikolaï Rimsky-Korsakov et lui), qu’il anime avec une autorité un brin castratrice pendant plus de dix ans.
La dissolution du groupe le plonge dans une dépression très noire durant laquelle il disparaît du paysage musical et cesse de composer. Il tente à nouveau de constituer un groupe avec d’autres musiciens, mais il n’a plus l’influence obtenue avec le précédent.
Grand orchestrateur en grande partie autodidacte, comme Nikolaï Rimsky-Korsakov, il est, au contraire de son élève et assistant, très lent dans ses compositions. Sa production n’est donc pas pléthorique, mais elle compte quelques grandes œuvres caractéristiques de son style, à l’invention mélodique incontestable, nourries des influences slaves et orientales.
Son chef-d’œuvre est Tamara, poème symphonique qu’il commence en 1867 et termine en 1882. Tiré de Mikhaïl Lermontov, il raconte l’histoire de la princesse Tamara, qui vit dans un château du Caucase, au-dessus du fleuve Terek. Chaque jour, telle une araignée voluptueuse, elle attire dans ses filets et par ses chants sensuels un voyageur qui passe par là, lui offre une nuit d’amour, puis l’assassine et le jette dans le Terek. Le thème qui décrit Tamara sera repris presque intégralement par Rimsky-Korsakov pour sa Sheherazade, comme quoi une même phrase musicale peut raconter deux histoires très différentes…
Dédié à Liszt, Tamara est créé le 7 mars 1883 à Saint-Pétersbourg sous la direction de Balakirev lui-même, qui est nommé la même année directeur de la chapelle impériale de Saint-Pétersbourg.