URGENT : création d’un régime solidaire pour le spectacle !
Ce n’est qu’en 1884 que la France, par la loi du ministre Waldeck-Rousseau autorisant les syndicats, reconnaît (enfin) le droit aux travailleurs d’être représentés ; ce droit leur avait été retiré en 1791 par la loi le Chapelier. Soit presqu’un siècle durant lequel, à la faveur de la Révolution Industrielle, l’exploitation de l’homme par l’homme put s’exercer sans entrave ! Le combat n’était cependant pas gagné : un siècle après la loi le Chapelier, le 1er mai 1891, eut lieu l’horreur de la fusillade de Fourmies ; en quelques secondes, la troupe réprima dans le sang la manifestation pacifique d’ouvriers en grève…
Création des syndicats à la fin du XIXe siècle
On vit par la suite les grandes centrales syndicales s’installer. Aujourd’hui, la CGT, la CFDT, FO et plus modestement la CFTC, représentent les principales structures de défense des salariés. Côté employeurs, le MEDEF et la CGPME se partagent la part du lion.
En ce qui concerne les professionnels du spectacle, plus particulièrement pris en compte durant la période d’avant-guerre ou juste après-guerre, les fédérations sont en quelque sorte les branches des grandes confédérations.
- Pour la CGT, il y a notamment FNSAC : Fédération Nationale des syndicats du Spectacle, de l’Audiovisuel et de l’action Culturelle.
- Pour la CFDT, le SNAPAC : Syndicat National des Artistes et des Professionnels de l’Animation, du sport et de la Culture.
- Pour FO, la FASAP : Fédération des syndicats des Arts, des Spectacles, de l’Audiovisuel, de la Presse, de la communication et du multimédia.
Notons aussi le CIP-IDF, Coordination des intermittents et précaires d’Île-de-France, qui n’est pas un syndicat et donc n’a pas de représentativité officielle, mais qui ne manque pas d’intérêt puisqu’il se préoccupe de façon permanente et exclusive de la défense des intermittents du spectacle.
Côté employeurs, seul le secteur audiovisuel est organisé. Notons, parmi d’autres, l’Union Syndicale de la Production Audiovisuelle (USPA), l’Association des Producteurs de Cinéma (APC) ou le Syndicat de producteurs indépendants (SPI).
Le spectacle : un succédané des revendications syndicales ?
Si les organisations défendent des avantages acquis ou à acquérir, dans une logique de négociations ou par des rapports de force, elles inscrivent bien souvent leurs combats dans des préoccupations syndicales plus vastes : c’est un classique de temps de crise ! En attendant, la part du monde du spectacle reste malheureusement marginale.
Il semblerait aussi que l’adhésion aux syndicats ne constitue pas l’objectif prioritaire de bon nombre de professionnels, intermittents ou permanents.
Deux questions se pose alors :
- Dans le domaine du spectacle, quelle est la différence réelle entre un petit employeur ponctuel et un salarié ?
- Pourquoi ne pas imaginer une organisation qui défende tous les métiers du spectacle ?
Car, que l’on soit employeur ou salarié, cela mobilise les mêmes savoir-faire, les mêmes compétences… avec au final la même précarité.
Il est temps que le monde du spectacle cesse d’être assimilé au monde industriel : respectons enfin sa spécificité !
Pour un régime vraiment solidaire…
Osons réfléchir sur quelques-uns des chantiers majeurs qu’aurait une organisation digne du spectacle vivant…
Le premier chantier porterait évidemment sur la création d’un régime de cotisation sociale plus cohérent : le mode de calcul doit par exemple prendre en compte les cotisations, non pas des seuls intermittents, mais de ceux de l’ensemble des professionnels du spectacle ; les cotisations des permanents, qui présentent un solde positif parce qu’ils travaillent à plein temps, sont à intégrer dans le régime des professionnels du spectacle, en vertu même de l’activité exercée. Si le risque est d’appauvrir le régime général, nul doute que le déficit causé par les intermittents serait en grande partie résorbé. Nous aurions alors une vision plus claire de la réalité totale du monde du spectacle… sans parler de la solidarité qu’une telle mesure entraînerait !
La vraie solidarité doit se répercuter sur l’ensemble des métiers du spectacle : ils représentent, du décorateur au technicien lumière, de l’artiste au preneur de son, plus de 420 000 professionnels en France. Une véritable force qui aurait intérêt à se fédérer en tant que partenaires de la construction du spectacle. En défendant le spectacle, nous défendons tous les professionnels qui en sont, chacun à sa place, les artisans.
Nombreux sont les exemples d’organisateurs ou d’employeurs du spectacle qui partagent la même aventure que leurs salariés. Vouloir les mettre face à face, au nom d’une vision par trop conceptuelle de la vie syndicale, est le meilleur moyen d’altérer la représentativité et l’efficacité des professionnels.
Nous demandons des assises du spectacle !
En outre, la précarité des métiers du spectacle provoque une alternance des situations professionnelles : l’intermittent de la veille peut devenir permanent aujourd’hui et employeur demain, avant de retrouver sa situation initiale, en fin de carrière. Alors quoi ?
Réinventons le syndicalisme autour d’une perception commune, celle d’une organisation représentative de l’ensemble des professionnels du spectacle. Voilà ce que pourrait être, dans un avenir proche, le vrai changement, le bouleversement… spectaculaire ! Le syndicalisme en serait même renouvelé.
Oui, la question lancinante de l’avenir des intermittents est entièrement contenue dans la création d’un syndicat professionnel.
Dans cette perspective, je réitère notre proposition d’organiser, avec toutes les bonnes volontés, les assises des professions du spectacle (vivant et audiovisuel). Comme il semble que le ministère de la culture, quel que soit son titulaire, n’est pas intéressé, faisons-le nous-mêmes…
Olivier FRETTOIS