4 novembre 1890 : une œuvre posthume et collective, signée Borodine & Co.
Instant classique – 4 novembre 1890… 128 années jour pour jour. Alexandre Borodine avait très tôt fixé le thème de ce qui resterait son unique opus lyrique sous le titre de Prince Igor.
Dès 1869, il avait choisi de s’inspirer d’un très ancien manuscrit russe, Le Dit de l’Ost d’Igor, et il passa le reste de sa vie, jusqu’à sa mort brutale en 1887, à en construire la partition, puisqu’il faut rappeler ici que Borodine était un chimiste et qu’il composait en amateur. L’ouvrage fait d’abord trois actes et un épilogue, puis un prologue et quatre actes, puis est abandonné pendant plusieurs années au point de servir de matériau à sa seconde symphonie, avant d’être repris au milieu des années 1870, dans la plus grande confusion. À la mort de Borodine, seuls dix numéros étaient prêts et orchestrés.
Alexandre Borodine avait demandé peu auparavant à son ami, l’omniprésent Rimsky-Korsakov, de l’aider à compléter la partition, lequel y travailla avec Alexandre Glazounov. C’est ce dernier qui doit réaliser la fin de l’œuvre, labeur énorme sur la base de fragments parfois très approximatifs. Certains pensent que l’ouverture, en forme de pot-pourri, est également son œuvre. C’est cet assemblage qui est finalement créé avec grand succès trois ans après la disparition du chimiste-compositeur, au théâtre Mariinsky de Saint-Pétersbourg.
C’est plus d’un siècle et beaucoup de travaux de recherches musicologiques plus tard, pour retrouver une partition apparemment proche des intentions d’origine du compositeur, dont Rimsky-Korsakov et Glazounov avaient quand même beaucoup charcuté la partition initiale.
L’œuvre en sort-elle grandie pour autant ? Le fameux et magnifique air sombre d’Igor, à l’acte II, est bien quant à lui de la main de Borodine, qui en fit plusieurs versions lui-même, ici merveilleusement chanté par George London, il y a plus de cinquante ans.