31 octobre 1887 : Rimsky-Korsakov compose “une outrecuidance sonore délirante”
Instant classique – 31 octobre 1887… 132 ans jour pour jour. Tout comme Bizet pour Carmen, Nikolaï Rimsky-Korsakov n’a jamais mis les pieds en Espagne. Ce qui ne l’empêche pas d’entreprendre en 1887 une œuvre symphonique basée sur des thèmes hispanisants, tirés d’un recueil de José Inzenga, Ecos de España, collección de cantos y bailes populares.
Il se trouve qu’à ce moment là, Rimsky-Korsakov est dans une phase un peu pénible. Son ami Borodine vient de mourir en laissant inachevé son opéra Prince Igor, qu’il s’emploie à terminer avec Glazounov, dont on parlait hier. C’est donc pour se distraire qu’il écrit parallèlement cette nouvelle œuvre.
« Les thèmes espagnols, surtout de caractère dansant, me donnèrent de riches matériaux pour la réussite d’effets orchestraux variés », écrira-t-il plus tard. Il n’est pas le premier : son aîné et père de la musique russe moderne, Glinka, avait déjà donné de magnifiques exemples de ces emprunts aux thèmes espagnols fondus dans un matériau assez russe.
L’œuvre est découpée en cinq parties : une alborada vous saisit d’entrée, suivie de variations tendres et rêveuses (il faut bien se reposer un peu), puis l’alborada revient, avant un chant gitan de plus en plus énergique et enfin un fandango des Asturies endiablé que vient couronner l’alborada initiale dans une ronde furieuse.
Lorsque l’œuvre est créée à Saint-Pétersbourg il y a tout juste cent trente-deux ans, elle remporte un vif succès. Re-belote en 1889 à Paris pour l’Exposition universelle (celle de la Tour Eiffel), où la presse en rend compte avec la phrase qui ouvre cette chronique.
C’est bien l’idée qu’en avait Leonard Bernstein avec ses new-yorkais lorsqu’il l’enregistra. Les dernières mesures sont étourdissantes et les musiciens ont dû avoir bien mal aux doigts !