29 septembre 1837 : Robert risque tout pour conquérir Clara
Instant classique – 29 septembre 1837… 182 ans jour pour jour. Il n’a pas choisi la facilité, Robert Schumann, en composant sa première sonate pour piano. Il la débute à seulement vingt-et-un ans et l’achève quatre ans plus tard, en 1835.
Entretemps, il rencontre Clara Wieck, fille de son professeur de piano, lequel avait fait de la jeune Clara, de neuf ans la cadette de Schumann, une petite virtuose de l’instrument avec des méthodes assez brutales. Très présent chez les Wieck à Leipzig, Schumann est au départ pour Clara comme un grand frère et une admiration réciproque pour leurs dons respectifs grandit vite. Lorsque Schumann achève sa sonate, Clara a seize ans et lui vingt-cinq. C’est l’année où leur amour, auquel le père Wieck s’opposera avec toute son énergie, se révèle. Clara créera la sonate deux ans plus tard, il y a cent quatre-vingt-deux ans.
Il s’agit d’une œuvre d’un jeune homme fougueux et surtout hardi, tant le cadre habituel de la sonate est malmené, tant les dissonances (écoutez autour de la dix-huitième minute) sont inédites. Schumann est un romantique qui risque tout. Il n’a de cesse de s’envoler avec Clara (il leur faudra cinq ans avant de pouvoir se marier), doit renoncer à une carrière de pianiste virtuose en raison d’une paralysie partielle de sa main droite (certains disent qu’il s’était ligaturé un doigt en espérant jouer plus vite), commence à donner des signes d’emportement et d’instabilité qui ne feront que s’accroître dans la seconde moitié des années 1840.
Tout risquer pour conquérir Clara, la garder contre vents et marées, lui dédier ses œuvres, les bâtir en n’ayant qu’elle en tête avant de les lui confier aussi, comme dans une sorte de fusion, comme les huit enfants qu’ils auront pour le meilleur et pour le pire, voilà alors toute sa vie.
La sonate ne sera dès lors pas très bien accueillie. Trop tôt pour ces outrances. Rare parmi les auditeurs, Franz Liszt sera l’un des premiers à mesurer le caractère précurseur de cette œuvre, dont Murray Perahia magnifie ici l’exaltation.