29 janvier 1920 : un autre Barbe-bleue, bien oublié
Compositeur autrichien d’origine tchèque, Řezníček fait partie des grands oubliés de la musique classique. Ainsi de son opéra sur Barbe-bleue, à la partition complexe, dont nous fêtons l’anniversaire aujourd’hui : il n’en existe presque aucun enregistrement.
Après Dukas et Bartók, comment s’attaquer à la légende de Barbe-bleue lorsqu’on est un compositeur certes talentueux, mais devenu confidentiel ? Emil von Řezníček est l’homme d’une seule œuvre lyrique dont on ne retient d’ailleurs que l’ouverture : Donna Diana, en 1894.
Il a composé néanmoins une abondante production – y compris instrumentale – et était même très respecté dans les premières décennies du XXe siècle. Mais sa réputation a souffert d’une sorte de « fake news » avant l’heure, donnant à penser qu’il avait été un sympathisant nazi, ce qui n’est, semble-t-il, pas le cas. Sa femme était d’origine juive et sa fille est une résistante au régime. Mais tout le monde n’en a pas moins oublié Řezníček.
En 1915, il commence à composer un nouvel opéra – conte de fées autour de la figure du chevalier Barbe-bleue (Ritter Blaubart), ainsi qu’on appelle le personnage dans les contrées germaniques. Le livret lui est fourni par Herbert Eulenberg, dramaturge originaire de Cologne, qui a produit une pièce sur le sujet en 1906. Il aurait peut-être dû se méfier : sa pièce n’a rencontré aucun succès.
C’est peu ou prou ce qui va se passer pour l’opéra en cinq actes que Řezníček va en tirer et qui est créé un 29 janvier au Stadtheater de Darmstadt. L’œuvre est surtout centrée sur le profil psychologique de Barbe-bleue et le compositeur a réalisé la partition en pleine guerre. L’intérêt à l’époque n’est pas nul pour autant : l’œuvre est donnée à Leipzig, Vienne puis Berlin, où elle avait été refusée une première fois malgré l’aide et le soutien de Richard Strauss, qui était l’ami de Řezníček.
Désormais, à part un enregistrement unique sous le précieux label CPO, on ne connaît à peu près rien de cette partition à la musique relativement complexe, comme vous pouvez en juger dans ce petit teaser d’une production du théâtre d’Augsbourg.
À chaque jour son instant classique !
Rubrique : « Le saviez-vous ? »