28 février 1862 : l’échec définitif de Gounod
Instant classique – 28 février 1862… 156 ans jour pour jour. Habitué du Théâtre-Lyrique où ses dernières œuvres ont été données – y compris Faust –, Charles Gounod projette d’y créer un nouvel opéra, La reine Balkis, inspiré des Nuits du Ramazan de Gérard de Nerval.
Au bord de la ruine, le Théâtre-Lyrique renonce à le monter et c’est la salle Le Peletier, siège de l’Opéra de Paris, qui reçoit finalement le projet, émoustillée par le succès mondial de Faust. Il rebaptise la future œuvre en Reine de Saba. Charles Gounod termine sa partition à l’automne 1861 mais doit consentir de lourdes modifications dans un livret des inévitables Barbier et Carré, déjà passablement inepte. L’échec est total, le soir de la création il y a juste cent cinquante-six ans.
Hector Berlioz, pourtant compréhensif à l’égard de Gounod, ne le ménage pas davantage que les critiques et le public : « Il n’y a rien dans sa partition, absolument rien. Comment soutenir ce qui n’a ni os ni muscles ? »
Il faut ajouter à cela qu’en plein scandale autour du Tannhäuser de Richard Wagner, qui a été créé dans sa version de Paris quelques mois plus tôt, Charles Gounod a même subi l’accusation alors infamante de « wagnérisme ».
Rien ne peut dès lors plus sauver une œuvre inégale, plombée par son argument et qui ne rencontre plus jamais aucun écho dans les rares maisons lyriques qui essayent depuis de le ressusciter… On y trouve pourtant quelques beaux moments, comme ce grand air de Balkis, « Plus grand dans son obscurité », surtout lorsqu’il est chanté par la reine Régine Crespin.