2 août 1918 : un péché de vieillesse de Saint-Saëns
Instant classique – 2 août 1918… 101 ans jour pour jour. Le 25 mai 1918, alors que la France approche enfin, exsangue, de l’épilogue d’une guerre atroce, Camille Saint-Saëns, quatre-vingt-trois ans, écrit au compositeur Charles Lecocq, quatre-vingt-cinq ans.
Voici : « Maintenant, je pioche dans un quatuor à cordes qui sera fini Dieu sait quand… Mon quatuor est en sol ; il y a un dièse à la clef, quelle originalité ! Un temps viendra peut-être où l’on écrira en fa double dièse ; mais nous ne serons plus là pour voir ces belles choses ! »
Ce fameux quatuor qui semble tant l’amuser est achevé un peu plus de deux mois après, le 2 août, voici donc cent-un ans. Dédiée à l’éditeur Jacques Durand, c’est une œuvre en trois mouvements à peu près égaux, pleins de nostalgie souriante et de tendresse, avec çà et là des audaces que pouvait bien se permettre le vieux compositeur.
Des audaces, mais pas de futurisme. Saint-Saëns ne comprenait pas la musique de son temps et regarde encore dans ce quatuor vers le siècle passé, avec la sérénité d’un artiste qui n’a de toute façon plus rien à prouver. On ne sait pas si Charles Lecocq en a vu la partition, puisqu’il disparaît au mois d’octobre suivant. Saint-Saëns, lui, tirera sa révérence trois ans plus tard.
Voici l’adagio central de ce séduisant quatuor, plus sombre, mais très beau.