19 septembre 1908 : les grandes musiques de nuit de Mahler
19 septembre 1908 – Mahler crée son Chant de la Nuit, sa 7e symphonie, la moins aimée de ses œuvres, l’une des moins jouée aussi. On lui reproche son désordre et son manque d’unité. Et pourtant, c’est un chef-d’œuvre qu’il faut approfondir, observer, laisser venir à soi pour être peu à peu ensorcelé sans retour.
C’est précisément le 15 août 1905 que Gustav Mahler termine, après un an d’un labeur acharné, la partition de sa septième symphonie. Il en fait le jour même l’annonce – comme un faire-part de naissance – en latin à son ami Guido Adler. La symphonie est purement instrumentale comme ses deux devancières. C’est aujourd’hui la moins aimée de ses œuvres, l’une des moins jouée aussi. On lui reproche souvent son désordre, voire son chaos, l’absence d’unité propre, ses provocations modernistes notamment dans les deux mouvements extrêmes (on compte cinq mouvements).
Si la symphonie est parfois appelée « Chant de la Nuit », ce n’est pas un titre que lui a donné le compositeur, mais cela découle de ses deux Nachtmusiken. La première constitue le deuxième mouvement de la symphonie et lui aurait été inspiré, dit-on, par le fameux tableau La ronde de nuit de Rembrandt à Amsterdam, ce que Gustav Mahler n’a jamais confirmé. C’est là qu’il insère son habituelle marche militaire, parade nocturne un peu étrange à laquelle succède comme par hasard un scherzo « Schattenhaft » (fantomatique).
La seconde Nachtmusikconstitue le quatrième et avant-dernier mouvement. Notée « Andante amoroso, mit Aufschwung » (avec élan), elle est très différente de la première. Alma Mahler assura plus tard que son mari l’avait composé en pensant aux « sources murmurantes des poésies d’Eichendorff », grand poète romantique. C’est une sérénade délicate, accompagnée dans l’orchestre par une mandoline, qu’on entend distinctement, et qui fait penser à quelque amoureux chantant sa déclaration. C’est l’extrait que j’ai choisi.
C’est seulement trois ans après l’avoir terminée que Gustav Mahler se décide à présenter son œuvre, dans le cadre d’un festival donné à Prague à l’occasion des soixante ans de règne de l’empereur François-Joseph. Les préparatifs, pour une fois, sont à la hauteur de ses attentes et les membres de l’orchestre font de leur mieux pour satisfaire le compositeur. Si bien que cette symphonie un peu décousue, parfois déroutante mais au finale étourdissant, est accueillie poliment, mais positivement. Manque d’enthousiasme que reflète dès le lendemain la presse. Et pourtant, c’est un chef-d’œuvre qu’il faut approfondir, observer, laisser venir à soi pour être peu à peu ensorcelé sans retour.
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Rubrique : « Le saviez-vous ? »
Photographie de Une – Détail de La Ronde de nuit de Rembrandt (1642, Rijksmuseum, Amsterdam)