17 octobre 1849 : il est mort, le poète
Frédéric Chopin meurt il y a 172 ans jour pour jour. Retour sur une fin de vie marquée par la maladie, la blessure du cœur et les ultimes compositions.
On le sait, Frédéric Chopin souffrait de phtisie, cette maladie terrible, alors incurable, qui est si associée au romantisme qu’on en oublierait presque sa permanence dans l’Histoire, jusqu’aux progrès médicaux initiés par Koch. Pour autant, c’est encore aujourd’hui la première cause de mortalité infectieuse, devant le sida.
Dans la seconde moitié des années 1840, Chopin décline lentement. Plusieurs coups de la vie viennent précipiter son affaiblissement. Il perd des amis chers, emportés parfois eux aussi par la même maladie. Comment ne pourrait-il pas voir sa propre destinée à travers la leur ? La rupture violente avec George Sand, en 1847, complète le tableau soudain noirci.
Son élève un peu envahissante, l’Écossaise Jane Stirling, à qui il avait dédié des Nocturnes, le convainc alors de faire une grande tournée en Angleterre, pays bien connu pour soigner les tuberculeux. Le voyage est triomphal mais l’épuise littéralement. L’air de Londres, vicié par le charbon et l’humidité, lui fait le plus grand mal.
Lorsqu’il revient en France, fin 1848, il est épuisé et sans un sou. Il continue à donner des cours, seul moyen de subsistance, allongé près du piano. Il reçoit des amis, dont le fidèle Delacroix, avec qui il va à l’opéra au début de l’année 1849, pour voir Le Prophète de Meyerbeer. En avril, il compose ses dernières œuvres, deux mazurkas, dont il n’achève que la première.
En juin, il déménage au 74 rue de Chaillot, près de l’actuel Trocadéro, quittant pour l’été son quartier de prédilection situé près des Grands boulevards. La princesse Obreskov paie sans le lui dire la moitié du loyer. Chopin demande à sa sœur de le rejoindre : « Les cyprès n’ont-ils pas aussi leurs caprices ? Mon caprice est de vous avoir ici. » Ludwika arrive de Pologne avec sa famille plus de deux mois après cette lettre, en septembre. C’est à ce moment-là qu’il déménage à nouveau (Chopin a eu neuf adresses à Paris en dix-neuf ans) pour ce qui est sa dernière demeure, comme en atteste une plaque aujourd’hui au 12 place Vendôme, où se trouve désormais le joaillier Chaumet.
Tout se précipite… Le 15 octobre, on lui donne l’extrême-onction et il exprime ses dernières volontés : détruire ses brouillons et ses manuscrits inachevés, donner à son collègue Alkan l’ébauche de sa méthode de piano, exécuter le Requiem de Mozart à son enterrement et transférer son cœur en Pologne. Chopin s’éteint le 17 octobre, voici cent soixante-douze ans aujourd’hui.
J’ai donc choisi le tout dernier opus, cette mazurka op. 68 n°4, qui est en réalité surtout une esquisse, complétée depuis par le pianiste polonais Jan Ekier et dont le manuscrit original est conservé à la Bibliothèque nationale de Varsovie. C’est cependant la version du violoncelliste Franchomme, ami de Chopin, qui est la plus jouée même si elle est moins réussie, de l’avis général. Mais peu importe au fond, car avec ou sans ces compléments, la partition, même esquissée, est une merveille, mais une merveille voilée. On y trouve tout, et évidemment en premier lieu cette souffrance. Chopin l’a un peu conçue comme un mouvement perpétuel, en quelque sorte, puisqu’il écrit une indication un peu particulière : « Da capo senza fine. » Comme si elle ne devait jamais s’arrêter. Un peu comme l’œuvre de Chopin dans la mémoire des hommes.
La voici délicatement jouée par une légende (ombrageuse) du piano, Arturo Benedetti Michelangeli.
Un jour… une œuvre musicale !
Rubrique : « Le saviez-vous ? »