14 juillet 1788 : querellez, querellez, il en restera toujours quelque chose
Instant classique – 14 juillet 1788… 232 ans jour pour jour. Le début de l’été 1788 est pour Mozart terriblement catastrophique. Il perd sa dernière fille âgée d’à peine six mois et sa situation matérielle devient extrêmement précaire et même indigente.
Mozart cherche désespérément de l’aide pour obtenir un peu d’argent et se lance aussi dans une avalanche de compositions (une dizaine en deux mois dont les trois dernières – et magistrales – symphonies). Parmi elles, ce trio en ut majeur, de très belle facture pour ceux qui n’ont que l’émotion pour horizon, mais qui suscitera bien plus tard quelques petites querelles dont le monde artistique a le secret.
Le grand musicologue Alfred Einstein (à ne pas confondre avec Albert) jugera cent cinquante ans plus tard que ce trio n’est qu’une sorte d’esquisse assez secondaire de la symphonie « Jupiter », sans grand intérêt. Pas d’accord ! lui répond plus tard un autre musicologue, Carl de Nys, qui constate que les nombreuses indications maçonniques sur la partition font de celle-ci une œuvre sans doute moins négligeable, au moins dans sa destination. Il souligne aussi que l’andante, si doux et si chantant, est pour lui une méditation sur la mort et que le dernier mouvement, rondo, est très (trop ?) introverti… Pas d’accord ! lui répondent Jean et Brigitte Massin, auteurs d’une biographie monumentale de Mozart à la fin des années cinquante. Ils veulent bien constater aussi que l’œuvre n’est pas un simple brouillon d’autre chose, mais ne partagent pas l’appréciation de de Nys sur les deux derniers mouvements. Ils se contentent de relever que ce trio est en deçà du précédent, daté du 22 juin, et qui correspondait à un moment encore différent.
Bref, toutes ces joutes intellectuelles ont leur intérêt musicologique, mais ce qui compte, les petits amis, c’est bien ce qu’on entend. Certes, le rondo final me paraît aussi fort sage. Mais le premier et le second mouvement sont vraiment ravissants. Car même secondaire, en retrait, concentré sur d’autres œuvres bien plus grandes encore, Mozart, c’est encore du Mozart.
Voici une interprétation par des musiciens viennois fort prestigieux, vieil enregistrement de 1954 (!) dont la qualité sonore ne laisse pas de me surprendre. Il vous permettra au moins de vous faire votre propre idée !