19 janvier 1853 : « Il Trovatore n’a pas mal marché » (Verdi)
Instant classique – 19 janvier 1853… 165 ans jour pour jour. « Il Trovatore n’a pas mal marché. » C’est par cette phrase très laconique que Giuseppe Verdi accueille le triomphe mémorable réservé par le public romain au Teatro Apollo (aujourd’hui disparu) à son nouvel opéra, le second de la trilogie dite « populaire » : Rigoletto, Le Trouvère et La Traviata, qui ont pourtant peu de choses en commun, sinon la profondeur du drame verdien.
Nul doute que ce succès était avant tout celui de la musique flamboyante composée par Giuseppe Verdi, qui avait achevé la partition à l’hôtel Europa à Rome.
Parce que côté livret, écrit par Cammarano qui était alors malade et qui allait mourir peu après, l’œuvre passe à juste titre pour l’une des plus alambiquées et pour tout dire des plus invraisemblables de toute l’histoire de l’opéra. Comme l’aspirine n’existait pas en 1853, Verdi avait laissé faire. Il ne s’en inquiétait d’ailleurs pas trop : « Si vous voulez, nous publierons tous les vers faits par Cammarano en glissant une petite note dans le programme ». Je n’essaierai même pas de vous le résumer.
Impossible pourtant de résister à ce chef-d’œuvre, garni de tubes en tous genres, de moments héroïques, intimes, tragiques, etc. Le soir du 19 janvier, le public romain offre au compositeur une couronne de lauriers et, au soir de la 3e, le porte en triomphe jusqu’à l’hôtel Europa.
Difficile de choisir parmi les tubes dont je parlais, entre l’introduction, ou « Tacea la note » ou « Di tale amor », ou « Per me ora fatale », ou « Di quelle pira » ou « Stride la vampa », ou le « Miserere », sans parler du chœur des gitans ou celui des soldats.
Alors autant prendre l’un des moments de grâce, à l’orchestre diaphane et délicat dans « d’amor sull’ali rosee ». Et comme il est encore plus difficile de choisir parmi les innombrables interprètes légendaires qui ont chanté le rôle de Leonora, autant choisir celle qui vole chante beaucoup ces dernières années (à Bastille y compris) et qui est l’une des grandes titulaires du rôle de notre temps, Anna Netrebko. Caruso disait qu’il fallait les « quatre plus grandes voix du monde » pour réussir Il Trovatore. Ce n’est pas tout à fait vrai, mais avec Netrebko, on en tient au moins une.
Cédric MANUEL